Aventures aux Iles Mingan: À la rencontre des Macareux

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J’en rêvais depuis des années : les Iles Mingan et ses fameux macareux. Un site enchanteur qui se trouve exactement à 1000 km de chez moi, en plein milieu du Golfe du Saint-Laurent. L’emploi que j’occupais durant les dernières années ne me permettait pas de faire le voyage durant la saison estivale, moment où les macareux entrent dans leurs terriers pour nicher avant de repartir au large pour l’hiver. Cette année, j’ai quitté ma job pour me consacrer entièrement à la photo, ce qui me permet d’y accorder tout mon temps. Je dois le dire, j’ai hésité longtemps avant d’aller jusqu’à Longue-Pointe-de-Mingan, principalement pour des raisons monétaires. Mais finalement, sur un coup de tête il y a trois semaines, j’ai décidé de réserver trois nuits d’hôtel. Coup de chance, une chambre s’est libérée. Je réserve. Trois semaines plus tard, je suis en route.

Première journée, nous arrivons 4 bateaux sur l’île aux Perroquets, la seule île sur laquelle se trouve des macareux qui est accessible au public. L’île est minuscule et les 48 personnes créent beaucoup de « mouvement » sur l’île. Il est 8h du matin. Il pleut. Les macareux sont loin. Il faut comprendre que l’île se trouve dans un parc protégé, et donc les lieux d’observation sont limités par des cordes pour diminuer au maximum le dérangement des oiseaux. Ce qui est tout à fait normal et souhaitable! Mais sur le coup, je dois avouer que je suis très déçu… Le seul endroit où il est possible de voir les macareux des pattes au bec est une falaise à contre-jour, et les oiseaux sont très haut. Depuis le sentier au sommet de la falaise, on peut apercevoir des petits bouts de tête dépasser des herbes mais sans plus. Avant de partir, j’avais prévu le coup et acheté une lentille spécialement pour l’occasion, qui allait doubler ma portée. Mais cette lentille, de moindre qualité de ce à quoi j’ai l’habitude, me donne des images floues et décevantes.

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Ça fait une heure que je suis sur l’île, il pleut toujours. Je n’ai aucune photo satisfaisante. Je commence réellement à me demander ce que je fais à cet endroit. Pourquoi tant de gens viennent ici, dans ce lieu de « rêve » pour y faire de la photo, alors que les opportunités sont très limitées et les accès restreints. Je pense au temps, à l’argent que j’ai investi, et je commence réellement à me dire que je vais quitter, retourner à Bergeronnes et me trouver d’autres opportunités photos. Quel niaiseux!  Un mélange de stress et de fatigue sans doute… Ceci étant dit, les gens commencent à quitter l’ile tranquillement pour se rendre sur les prochaines et poursuivre la visite. Pour ma part je reste, avec un autre photographe que je ne connais pas, et le naturaliste de Parc Canada. Je vais voir ce dernier, et lui expose mes états d’âmes… Très gentil, il prend le temps: « Regardes, près du quai dans la butte de terre juste là, il y a au moins une dizaine de nids. Si tu regardes comme il faut, les macareux arrivent au-dessus du nid le bec plein de poissons pour nourrir leurs petits, et virent de bord à la dernière minute, effrayés par les nombreux touristes présents. Va t’installer à côté de la barrière et attends que les bateaux partent, tu m’en redonneras des nouvelles. » Un clin d’œil, et il quitte vers le phare pour y continuer sa journée. Je m’installe donc sur la plage près de la butte, sans grandes attentes. Il se mets à pleuvoir de plus en plus et le temps est gris. Je regarde les bateaux quitter en me demandant pendant une fraction de seconde pourquoi je ne suis pas dessus… À ce moment, j’entends des battements d’ailes tout près de moi. Je me retourne lentement, un macareux est là, à peine à 3 mètres de moi, et il me regarde l’air intrigué. L’émotion que j’ai vécu à ce moment, c’est indescriptible. J’ai doucement mais rapidement changer de lentille. Il était trop proche, je ne pouvais pas faire le focus! Je me retrouvais avec le problème inverse. Tout en restant assis sur la plage, je me recule d’un pied, et ça y’est, c’est assez pour faire le focus. Celui-là, il est resté un bon 10 minutes avec moi. Puis, plusieurs autres se sont relayés, entrant tour à tour dans leur terrier le bec rempli de lançons et d’éperlans pour nourrir les petits. D’autres faisaient leur toilette, ou nettoyaient l’entrée du terrier. Je n’existais plus. Je faisais partie du décor.

Passer d’une grande déception à une excitation aussi intense, c’est ce qui fait de la photo animalière quelque chose d’exceptionnel. Après avoir pensé que je ne ramènerais aucune bonne shot, je suis finalement revenu avec des photos que je n’aurais pas imaginé en rêve! À 13h00, mes deux cartes mémoires étaient pleines et j’ai passé l’après-midi à parler avec d’autres visiteurs et surtout à observer et profiter de ce lieu magnifique. Le soleil est sorti d’entre les nuages et les envolés de Petits Pingouins, Guillemots marmette, Fou de Bassan et Macareux donnaient au décor un dynamisme incroyable.

 Le lendemain, je suis retourné dans l’idée d’essayer de faire des images en vol. Pas facile! Ils volent vite ces petits! J’ai réussi à en faire quelques-unes, et le bateau est venu me récupérer après une heure, car le temps était vraiment mauvais et le bateau n’aurait pu venir me chercher à la fin de la journée.

Habituellement, je ne me déçois pas aussi vite. Je me trouve un site qui aurait la possibilité d’être intéressant et j’attends. Mais j’avais l’impression qu’aucun endroit avait la moindre chance de me donner une opportunité intéressante. Je ne sais pas exactement ce qui s’est passé cette journée-là. J’étais fatigué, déçu de ma lentille que j’avais attendue pendant longtemps et qui m’avait coutée de nombreux dollars, sans compter toutes les dépenses que j’avais faites pour être là. J’en rêvait depuis tellement, mes attentes étaient trop élevées, j’avais l’impression que pour une fois, ce serait facile. Finalement, j’ai dépassé mes attentes « trop » élevées, et j’en suis déjà à y organiser ma visite pour l’an prochain, avec le souhait d’explorer davantage les lieux et les différentes îles. Cette région fabuleuse : on se sent en mer. On se sent au nord. C’est tout un dépaysement, et c’est très agréable. Ça fait décrocher. Je vous souhaite sincèrement d’avoir la chance au moins une fois dans votre vie de vous y rendre. Un endroit dont on ne sort pas indemnes ;)

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